Incursion en territoire Navajo.

 

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La « Navajo Nation » est la plus vaste réserve indienne des Etats-Unis. Située dans la partie nord-est de l’Arizona, elle déborde sur l’Utah et la Nouveau-Mexique. Pour nous rendre à « Monument Valley », nous pénétrerons donc en territoire Navajo. Voici un peuple qui, brimé et spolié, a su se redresser pour profiter à son tour des bienfaits du tourisme… Disposant de leur propre capitale et gouvernement, ils empochent les taxes, droits d’entrée des parcs tribaux, imposent leurs guides lors des visites et autres excursions, assurent les navettes en pick-up ouverts et équipés de banquettes. Ils vendent à prix d’or souvenirs et soi-disant pièces uniques issues de l’art Navajo…Sur Rodéo Drive, vous déboursez pour St Laurent, Versace, et autres Van Cleef, ici pour un « Made by Navajo » ne vous étonnez pas de payer une simple petite statuette sculptée dans un morceau de bois à 300-400$.  Notre façon de voyager, avec notre propre véhicule, nous offre une entière liberté quant à l’organisation de nos journées, évitant de telles arnaques… sujet que j’aborderai dans le prochain post.

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La personnalité des Navajos nous a laissé un peu perplexes… (Ci-dessous, voici le genre de ghetto dans lesquels ils vivent maintenant, soit des parcs à caravanes, soit des baraquements de chantier comme sur les 2 photos suivantes chez les Anasazis, une autre communauté indienne)

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Partout ailleurs, le personnel nous dit bonjour, sourit, nous gratifie d’un « How are you today ? » et nous souhaite une bonne journée.  Chez les Navajos, l’approche est diamétralement opposée, ils ne vous disent pas bonjour et si, vous, vous le faites, peu vous répondent, les sourires sont rares et ne vous attendez surtout pas à entamer une discussion… Au restaurant du Goulding’s  lodge, une grosse dame Navajo nous jette une carte sur la table, revient prendre la commande 1 minute 30 plus tard comme si nous y dînions tous les jours et connaissions celle-ci par cœur, repart en soupirant parce que notre choix n’est pas encore fait, revient 1 minute plus tard comme si ce laps de temps suffisait pour parcourir l’ensemble de la carte,… ce cinéma se répètera facilement 4 à 5 fois la rendant de plus en plus rageuse.  En observant les autres tables, je me rendis compte que nous n’avions pas hérité de la plus râleuse… Il y avait encore bien pire !

En entrée, Catherine et moi opterons pour un « Salad Bar » et France pour des ailes de poulet sauce BBQ.  A peine les entrées entamées la grosse dame se planta devant notre table les plats principaux à la main.  Sans un mot elle hocha de la tête pour nous faire comprendre que nous devions faire de la place sur la table.  En voyage, j’ai pour principe de ne jamais déterrer la hache de guerre c’est pourquoi je m’exécutai sur le champ.  La qualité de la nourriture est à l’image du service offert.  Une fois le repas terminé, une autre grosse dame se présenta avec le même hochement de tête pour que nous débarrassions la table à sa place.  Autant vous dire que le pourboire, obligatoire aux U.S.A. et compris théoriquement entre 15 et 20% du montant hors taxe suivant votre satisfaction, sera réduit à son strict minimum.  J’avoue même que le nôtre ne dépassera pas 6%.  Je suis même parvenu à faire courir la grosse dame qui dut nous rattraper car, pressé de quitter sa « charmante compagnie », j’avais omis de signer le reçu de la carte de crédit…   (Ci-dessous, Catherine et France qui rient encore de mes âneries et remarques sur le restaurant...  Quel plaisir que de pouvoir tout prendre au second degré et avec beaucoup de dérision...)

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Bref, les Navajos sont assez indéchiffrables et froids, la qualité de leurs services est, selon leur humeur, plus que variable…  Est-ce dans leur nature ?  Nous ne le saurons jamais mais les dommages collatéraux, lourds héritages de la conquête de l’Ouest ont très certainement laissé des traces de générations en générations. 

Quelques photos tirées sur la route...

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L’hôtel dans lequel nous logerons (Goulding’s lodge) appartient maintenant à la communauté Navajo.  Initialement il a été fondé en 1928 par Harry Goulding qui, après avoir passé 4 ans à faire du troc sous une tente en plein désert, fut considéré comme un des leurs par les Navajos.  

A première vue, l'hôtel ne casse rien mais nous ne sommes pas à Las Vegas et le but est, ici, de se fondre dans le payasage et d'être le moins remarquable possible pour ne rien dénaturer.  Toutes les chambres sont orientées pour constituer de véritables places VIP sur "Monument Valley" et de pouvoir profiter des jeux de lumières au rythme du soleil.

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Pour faire connaître « Monument Valley » alors inconnu du monde entier et, pour remplir ses poches, Harry Goulding se rendit à Hollywood pour y rencontrer John Ford.  Pour arriver à ses fins, il patienta pendant plus de 3 jours avant d’enfin obtenir un entretien.  Impressionné par les photos, John Ford décida, sur le champ, de venir y tourner son prochain Western ; « La chevauchée fantastique » avec John Wayne.  Nous sommes en 1939, un immense plateau de cinéma est né…

Image d'archive sur le tournage de "La chevauchée fantastique" :

 

La chevauchée fantastique

 

 

John Ford lors de la réalisation d'un de ses 9 westerns tournés à "Monument Valley" : 

 

John Ford at Monument Valley

A partir de ce moment, de nombreux Westerns y seront tournés.

Un grand nombre de stars et réalisateurs y sont descendus.  John Ford avait toujours la même chambre, d’un confort nettement plus sommaire qu’aujourd’hui.  

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Vous savez maintenant pourquoi les monolithes de « Monument Valley » nous semblent si familiers tant ils apparaissent dans de nombreux films et dessins animés.

Lucky Luke at Monument Valley

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Sur la route qui nous mène à notre destination, nous scrutons l’horizon afin d’être le ou la première à apercevoir les fameuses aiguilles rocheuses.  Catherine dont le papa est cinéphile à ses heures du moment qu’il y ait des armes, beaucoup de brutes, quelques truands, peu de bons et qui lui a repassé son 33 tours  préféré « The best of Ennio Morricone » semble très marquée par l’endroit.  C’est donc tout naturellement qu’elle s’écria : « Là, là c’est ça, woauhhh t’as vu France comme c’est beau ? »  

Route qui mène au site et première vision :

 

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Elle n’arrêtera pas de me demander de stopper toutes les 3 minutes sous prétexte de tirer un meilleur cliché.  

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Ironie du sort, les meilleurs angles et photos le seront de notre balcon.  

 

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Le spectacle est beau certes mais notre découverte de l’Ouest américain nous a déjà offert de plus spectaculaires vues dans des lieux parfois totalement inconnus.  Si je peux me permettre le rapprochement, « Monument Valley »  a cela d’humain c’est qu’en dehors de sa beauté extérieure, ce qui fait son charme vient surtout de ce qu’il représente…  Bien entendu, je ne parle que du spectacle s’offrant à nos yeux sans tenir compte des drames humains propres à toutes scènes historiques de par le monde. 

A la relecture du dernier paragraphe, je me rends compte qu’il m’arrive d’employer des termes parfois totalement incompréhensibles pour les plus jeunes.  Je m’efforcerai dès à présent d’ajouter une définition afin d’éclairer nos descendants. 

33 Tours : 

Gros disque noir servant à l’époque à écouter de la musique à l’aide d’une machine encore plus encombrante appelée « tourne disque ».  Cet objet sert maintenant surtout de décoration pour les nostalgiques d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître (là aussi, impossible pour cette génération de savoir qu’il s’agit d’un plagiat car Aznavour à plus de 90 ans…) et se retrouve essentiellement en brocante… Joke comme l’on dit ici :)

Pour info aux générations à venir...et oui c'était cela... :

tourne disque

C’est chez un petit épicier Navajo que nous achèterons de quoi petit-déjeuner en chemin vers « The Lake Powell ».  

Rien à signaler sur les 130 miles séparant ces deux points si ce n’est, la splendeur des paysages qui peu à peu nous devient familière tant elle est omniprésente.  

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Ci-dessous des Hogans que vous trouverez un peu partout sur le territoire Navajo.  Ces logements étaient construits en bois de cèdre, feuillages et adobe.  Il en existe deux types, les hogans mâles en forme de tipi et quasi disparus à nos jours (nous n'en verrons d'ailleurs pas) et les femelles, ronds et éminement maternels, apparus bien plus tard quand les Navajos se sont sédentarisés et ont commencé à faire plus d'enfants.

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C’est dans un « Marriott » surplombant  le «Lake Powell » à « Page » que nous passerons la nuit.  L’entrée dans l’agglomération est assez remarquable.  En effet, Page est le type même de la ville « champignon ».  C’est en effet en 1957 que le gouvernement décida la construction d’un énorme barrage sur le fleuve Colorado afin d’en contrôler les colères et produire de l’électricité. 

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La ville sortit donc de terre pour héberger les foules d’ouvriers, venus des quatre coins de l’Amérique, employés sur ce méga-chantier.  En témoignent les multiples églises de confessions diverses que nous rencontrerons, toutes regroupées dans un mouchoir de poche.  Sans rentrer dans le détail vous pourrez vous recueillir chez les mormons (dont c’est le fief), les baptistes, méthodistes, épiscopaliens, luthériens,…ou encore Elvispresliens… Le Routard nous apprendra que certaines organisent même des petits-dej ou des après-midi hot dog et concerts, de quoi attirer toujours plus de nouveaux fidèles ! 

De nos jours, l’objectif premier de fournir de l’énergie est relégué au second plan (il faut dire que le barrage ne sert uniquement que de support, durant les heures de pointe, à la centrale au charbon  à la sortie de la ville).  Le tourisme l’ayant largement supplanté.

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En effet, le « Lake Powell », né de la retenue des eaux, est une vraie réussite.  Le spectacle des énormes falaises rouges tombant dans les eaux métalliques du lac est l’une des visions magiques du Sud-Ouest américain.  Le deuxième plus grand lac artificiel des Etats-Unis déroule ces falaises vertigineuses dans lesquelles nous pourrons lire l’histoire de notre terre (comme dans un livre ouvert) et imaginer les animaux préhistoriques qui la peuplaient jadis.  

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Un peu plus loin, après un petit trek de 25 minutes dans le sable, nous accédons au point de vue « Horseshoe Bend. ».  

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Le fleuve Colorado s’enroule autour d’un énorme piton rocheux, tel un fer à cheval, d’où son nom.  Splendide !  Attention toutefois, les mises en garde sont nombreuses car la falaise est friable et peut se dérober à tout instant sous nos pieds…   

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Petite séance d'information en géologie par Catherine sur la lecture du sol et les conclusions à tirer de cette analyse suivant les roches que l'on y retrouve : lit de rivières, fonds marins,...etc Sans oublier les mouvements des plaques et donc du sol en surface suivant les périodes en étant attentif à la composition des strates qui se succèdent... Certains ont Universalis d'autres Google ou Wiki et nous nous avons la petite Catherine...

 

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Cette petite traversée du désert méritera bien une trempette dans la piscine de l’hôtel…

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Vers 19 heures, nous nous rendrons au « Blue Buddha Sushi Lounge » dont le Routard avait vanté les délices… 

 

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Et nous ne fûmes pas déçus, ces sushis « fusion », une vraie tuerie !!!

 

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Une fois la porte d’entrée franchie, une grande salle « lounge », banquettes semées de coussins, aquariums aux murs nous accueille.

Sur la droite, une petite salle plus japonisante, dans les tons rouges et noirs, avec des alcôves plus intimistes.

 

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Le fond sonore se rapproche plus de la musique « country » que des douces mélodies nippones.

Les sushis sont un savant mélange de tradition japonaise et de saveurs mexicaines plus épicées. Vous avez dit « fusion » ?  En voici un excellent aperçu…

Le premier plat sera composé de sashimis, cinq pièces de trois différents...  Le temps de prendre une photo, de reposer mon appareil et de dire "STOP !" afin d'arrêter France dans son élan pour pouvoir au moins en goûter un de chaque...Pffff j'ai failli ne pas voir la couleur du premier plat...

 

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Casquette vissée sur la tête, petite queue de cheval, yeux bleus, grands sourires francs, pantacourt et tatouages sur le mollet et l’avant-bras, Christopher nous fera tout de suite oublier la grosse dame de la veille.  France ne relèvera les yeux de ses sushis qu’à chacun de ses passages.  Du Colorado, il nous rappellera notre Chad rencontré en Afrique du Sud.

La prise de commande est totalement différente de ce que nous avons connu auparavant.  Une copie miniature sous forme de liste reprend l’entièreté de la carte et est disposée sur la table.  A chacune de nos commandes notre serveur y cochera notre choix.  Nous avons quasiment dévalisé toute la carte…  Notre sympathique serveur « Christopher » n’en revenait pas…  Au plus grand plaisir de France et en pensant à son prochain livre souvenir, sa maman, toujours très prévenante, demanda à Christopher de bien vouloir poser à côté de la « petite dragueuse ».

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Le lendemain, nous visiterons « Bryce Canyon » en Utah et, comme pour prolonger notre jouissance gustative de la veille, France et moi petit-déjeunerons avec des sushis…à suivre.